Nouvelle Présidence Trump
Après avoir remporté l’élection américaine du 5 novembre 2024, Donald Trump entamera, le 20 janvier 2025, un second mandat à la Maison Blanche.
Avec le Sénat et la Chambre des représentants sous le contrôle du parti républicain, et une Cour suprême majoritairement conservatrice, Donald Trump aura toute latitude pour mettre en œuvre son programme.
Notre membre Lexing pour les Etats-Unis, Janice F. Mulligan, analyse en profondeur les conséquences que pourraient avoir cette future présidence sur le droit des nouvelles technologies. Son analyse complète est disponible en anglais en cliquant ici et résumée en français ci-dessous :
Quelles conséquences pour le droit de l’IA et de la protection des données ?
Le document “Project 2025“, (“Mandate for Leadership: The Conservative Promise“) rédigé par la Heritage Foundation, un groupe de réflexion ultraconservateur soutenu par Trump, dessine les contours de ce que pourrait être la future politique de Donald Trump dans des secteurs clés.
Tout d’abord, plusieurs mesures prises par son prédécesseur Joe Biden, notamment en matière d’intelligence artificielle (2022 AI Bill of Rights et 2023 Safe, Secure, and Trustworthy Development and Use of AI) devraient ainsi être annulées.
Le pouvoir exécutif pourrait ensuite subir une restructuration massive et de nouvelles entités verront le jour, comme le Département de l’efficacité gouvernementale (Department of Government Efficiency” (DODGE)) avec à sa tête les milliardaires Elon Musk et Vivek Ramaswamy, dont la mission sera de réduire drastiquement les budgets des agences fédérales, ce qui pourrait entraver leur capacité à protéger les consommateurs.
IA et pratiques anticoncurrentielles
Donald Trump a annoncé la création d’un conseil sur l’IA et la cryptomonnaie (White House AI and Crypto Council), présidé par David Sacks (ancien cadre dirigeant de PayPal). Favorable à l’utilisation des contenus en ligne pour l’entraînement des IA et à l’intégration de l’IA dans les systèmes de défense et de sécurité nationale, ce dernier est également pourfendeur, au nom de la liberté d’expression, de toute forme de censure pour les modèles d’IA.
Par ailleurs, une limitation des pouvoirs de la Commission fédérale du commerce (Federal Trade Commission (FTC)) en matière anticoncurrentielle est à l’ordre du jour. Cette mesure pourrait, par exemple, avoir des conséquences sur les menaces de démantèlement pesant actuellement sur Google, accusé de pratiques anticoncurrentielles.
Cybersécurité
L’administration Trump devrait continuer à privilégier la protection des infrastructures essentielles à l’économie et à la sécurité des États-Unis. Toutefois, la Cybersecurity and Infrastructure Security Agency (CISA), vivement critiquée par Trump pour son excès de zèle dans la lutte contre la désinformation, pourrait être remplacée par un autre organisme.
Cryptomonnaies
La nouvelle présidence de Trump devrait instaurer un environnement réglementaire favorable aux cryptomonnaies, comme le bitcoin, sous la houlette du nouveau conseil sur l’IA et la cryptomonnaie (White House AI and Crypto Council). Son ambition: constituer une réserve stratégique de bitcoins et faire des États-Unis une “superpuissance crypto”.
Environnement
Le Projet 2025 prévoit le démantèlement des programmes fédéraux environnementaux et climatiques, et notamment la réduction des effectifs de l’agence de protection de l’environnement (EPA). Cette dérégulation, qui entraverait les efforts mondiaux pour lutter contre le changement climatique, devrait profiter aux industries énergivores comme le minage de bitcoins et l’exploitation des centres de données nécessaires à l’IA.
Immigration
En matière d’immigration, Donald Trump promet des déportations massives. Les “villes sanctuaires” qui refusent de collaborer pour l’application des lois fédérales sur l’immigration pourraient faire face à des sanctions financières importantes. Ces déportations auraient des effets économiques considérables, notamment dans l’Etat de Californie, où les immigrants représentent une part importante de la population active et contribuent significativement aux recettes fiscales.
Protection des données et vie privée
La protection des données à caractère personnel et de la vie privée sont des questions essentielles aux USA avec des conséquences importantes pour les citoyens, comme en témoignent les lois sur la criminalisation de l’avortement dans plusieurs États américains. Au niveau fédéral, le projet de loi American Privacy Rights Act (APRA), qui viser à établir une norme nationale de protection des données, a désormais peu de chances d’être adoptée. Ce texte pourrait être remplacé par une loi d’application limitée, plus favorable aux industries.
En matière de réseaux sociaux, le président élu Donald Trump prévoit d’imposer des règles de transparence strictes aux plateformes afin de limiter la modération de contenu. Le Projet 2025 plaide effet pour la suppression de l’immunité conférée aux sites internet par la Section 230 du Communications Decency Act de 1996 à l’égard des contenus publiés par leurs utilisateurs. Le Projet 2025 recommande également l’interdiction des applications chinoises comme TikTok et WeChat pour des raisons de sécurité nationale et de lutte contre le vol d’identité et de données.
Commerce international
Le Projet 2025 prône des mesures protectionnistes, telles que l’instauration de tarifs douaniers élevés qui pourraient perturber le commerce mondial.
Donald Trump propose d’ajouter une taxe supplémentaire taxe de 10 % sur les importations en provenance de Chine. Il envisage également des tarifs de 25 % sur les importations du Mexique et du Canada si ces pays ne contrôlent pas davantage pas le trafic de drogues et d’immigrants illégaux. Ces mesures vont fragiliser l’Accord États-Unis-Mexique-Canada (USMCA), qui est crucial pour le commerce nord-américain. Trump menace aussi d’imposer une taxe de 20 % sur les importations de l’Union européenne, en violation des engagements pris auprès de l’OMC.
Ces différentes mesures tarifaires risquent de provoquer des représailles, notamment du Mexique.